L'univers était une boule noire, posée là, dans un espace autrement plus vaste, illimité, d'une blancheur immaculée, aveuglante. Une blancheur de studio de photographie.
L'univers était immense, tout de même, d'une dimension assez semblable à l'orange Julep. Peut-être un peu plus petit, au fait.
Un gars est arrivé, a gravi un petit escalier de métal en fer forgé noir, et a ouvert une porte sur l'univers, dont l'intérieur semblait d'une noirceur encore plus prégnante que l'extérieur. Sans doute de l'air froid en émanait-il aussi, difficile à dire. Le gars n'a pas cherché à pénétrer à l'intérieur, s'est accoté dans l'embrasure de la porte, cherchant négligemment à scruter l'intérieur du regard, ce qui devait s'avérer assez difficile, considérant les lunettes miroir dont il ne semblait pas prêt à se départir. Une affaire de look. Bandana plié au front, cure-dent installé à demeure aux commissures, jean élimé, t-shirt aux manches grossièrement coupées, tatouages et peau bronzée, bottes de cow-boy, sa « coolitude » n'aurait pas détonnée en 1975, sur une grande avenue de downtown L.A.
Notez cependant qu'il avait choisi de poser ses fesses ici, aux portes de l'univers -sa création, et non sur le capot d'une Buick Century.
Car ce « gars » n'est nul autre que Dieu, créateur de toutes choses, dont cette boule noire aux dimensions légèrement inférieures à celles de l'orange Julep.
« Je me
révélerai être ce que je me révélerai être », pensa-t-il
négligemment, tout en faisant tourner son cure-dents entre le pouce
et l'index. Il avait l'habitude de formuler ce genre d'abstraction, d'une profondeur insondable pour nous.
Puis il referma la porte, secoua un peu son popotin, descendit le petit escalier avec style, et s'en retourna dans la blancheur immaculée.
Je subodore l'éclat d'une révélation, mais je dis cela et je ne dis rien.
RépondreEffacer